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Revirement de jurisprudence

Qu'est-ce que c'est et qu'est-ce que cela signifie ?

Description du terme juridique Revirement de jurisprudence:

Le revirement de jurisprudence représente une modification substantielle par les tribunaux de l’interprétation d’une règle de droit ou de l’application d’un principe juridique qu’ils avaient antérieurement adoptée. Cette évolution peut survenir à la suite d’un changement de circonstances, d’une meilleure compréhension des effets pratiques d’une règle ou d’une modification de la composition du tribunal. Le droit français, caractérisé par un système juridique de tradition civiliste, accorde une grande importance à la jurisprudence comme source de droit et guide pour la résolution de cas futurs, bien que la loi reste la source principale.

Un tel changement est loin d’être anodin et peut entraîner des bouleversements significatifs dans l’application du droit. Le revirement de jurisprudence a des conséquences immédiates non seulement pour les parties directement impliquées dans l’affaire ayant donné lieu à ce revirement, mais également pour tous les justiciables, puisque les décisions des hautes juridictions, en particulier celles de la Cour de cassation et du Conseil d’État, sont susceptibles de faire autorité pour les juridictions inférieures.

Cette évolution jurisprudentielle témoigne de la vivacité et de l’adaptabilité du droit en réponse aux mutations sociétales, technologiques ou économiques. Par ailleurs, cela reflète le fait que les juges, loin d’être de simples automates appliquant la loi, ont un rôle créateur de droit qui peut amener à repenser des orientations jusqu’ici solidement établies. Cependant, la prévisibilité et la sécurité juridique étant de principe cardinal en droit, un changement radical de jurisprudence est généralement accueilli avec prudence et circonspection.

Le revirement est en principe rétroactif, en ce sens qu’il s’applique aux situations non définitivement jugées. Bien que la Cour de cassation française ait, par le passé, limité les effets d’un revirement dans le temps pour préserver la sécurité juridique, cette pratique demeure exceptionnelle.

Contexte juridique dans lequel le terme Revirement de jurisprudence peut être utilisé :

Un exemple célèbre de revirement concerne l’affaire « Perruche » où, le 17 novembre 2000, la Cour de cassation a reconnu pour la première fois un droit à réparation pour un enfant né avec un handicap non diagnostiqué avant sa naissance en raison d’une faute médicale. Auparavant, seuls les parents pouvaient obtenir réparation pour le préjudice par ricochet qu’ils subissaient. Cependant, la réaction législative ne s’est pas fait attendre; en réponse, le législateur a adopté la loi du 4 mars 2002, dite loi anti-Perruche, qui exclut le droit à indemnisation de l’enfant dans de tels cas, mettant ainsi fin à la portée du revirement jurisprudentiel.

Un second exemple est le changement de position quant à la reconnaissance des fautes commises par les magistrats. Historiquement, l’inamovibilité des magistrats et le principe de l’immunité judiciaire rendaient les juges quasiment à l’abri des poursuites pour les fautes commises dans l’exercice de leurs fonctions. Toutefois, la Cour de cassation a, dans un arrêt du 23 février 2001, amorcé un revirement en admettant la mise en cause de la responsabilité personnelle des magistrats pour des fautes détachables de leurs fonctions.

L’importance cruciale du revirement de jurisprudence dans l’ordre juridique français réside dans sa capacité à harmoniser le droit avec l’évolution constante de la société tout en soulignant la place centrale des hautes juridictions dans la création et l’évolution du droit français. Certes, la stabilité jurisprudentielle est fondamentale pour assurer une certaine prévisibilité aux justiciables, mais le revirement reste un outil indispensable à l’ajustement de la jurisprudence aux nouvelles réalités sociales et légales.

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